La maison de France
Pourquoi ce titre pompeux ?
La Maison de France était une grande propriété avec jardin qui appartenait à la France du temps du protectorat. Elle était située au bord de la rivière non loin de la résidence du gouverneur. Elle était le siège des représentants français à Kampot.
A présent, elle est occupée par les Services Administratifs de la ville.
En attendant d'être rétrocédée au Gouvernement Cambodgien, elle était utilisée par les coopérants français comme logement.
C'est ainsi que nous fut attribuée une chambre avec salle de bain particulière à chacune. Nous fûmes rejoints dans un deuxième temps par des couples dont le mari géomètre travaillait à l'installation du chemin de fer Phnom-Penh-Kampot-Sihanoukville. Il nous fallut nous serrer un peu.
Nous y restâmes jusqu'en 1962.
Comme vous pouvez le voir sur les photos, l'aspect extérieur laissait à désirer mais l'intérieur était correct.
Nous avions bien de la chance d'être si bien logées face à la rivière. Le soir, nous appréciions la brise marine d'autant que les chambres donnaient sur une longue galerie intérieure.
La route était appréciée par les promeneurs à la fin de la journée.
Quelquefois, déambulait un colporteur avec sa cariole tirée soit par un buffle, soit par un boeuf, où s'entassait une provision de terres cuites. Souvent, des Chams venues du village de pêcheurs en aval acheminaient la pêche de leurs époux vers le marché.
La Maison de France avait un gardien. Il était d'origine Cham. La stature imposante, le sourire rare, il m'intimidait. C'était le vrai maître de la maison. Avec sa nombreuse famille, il habitait dans la "boyerie"(je déteste ce nom) à l'arrière de la maison. Musulman convaincu, son départ pour La Mecque en pélerinage l'auréola d'un grand respect de la part de son ethnie et de nous-même.
Il nous proposa de prendre à notre service son neveu Sok. Petit bonhomme râblé, tout en muscles, il était sympathique mais susceptible. Il était intraitable comme son oncle sur le respect de la religion : Pas de porc sur notre table. Après s'être marié, il nous quitta pour chercher du travail à Phnom Penh. Voici son mariage dans son village auquel il nous convia.
Une nuit, je fus réveillée par un concert nocturne de beuglements sonores.
Que s'était-il passé?
Sok rit beaucoup de mon inquiétude. Ce n'était que les coassements des crapauds-buffles dans la mare attenante. Je ne savais pas que de si petites bêtes pouvaient faire tant de tintamarre. Ma peur des geckos aux yeux globuleux dont était infestée la galerie l'amusait aussi beaucoup, il me rassurait par mimiques car il ne parlait pas français. Tant qu'on n'y touchait pas, le gecko était inoffensif. Occupé à gober les insectes, le gecko se moquait de la barang (française ) que j'étais ...